Le syndrome [E] / Franck Thilliez
Le syndrome [E] est un roman de Franck Thilliez initialement paru au Fleuve Noir en octobre 2010 (il est depuis disponible en poche chez Pocket).
Résumé
Liège, Belgique
Ludovic Sénéchal, cinéphile et collectionneur de la région lilloise a fait le déplacement outre-Quiévrain après avoir vu une annonce sur Internet. Un particulier possédant plus de 800 bobines anciennes est disposé à les vendre à bon prix. Sur place, Ludovic perd la vue en visionnant l'un de ces vieux films. Le lieutenant Lucie Henebelle voit ses vacances écourtées : on la charge de l'affaire du film qui rend aveugle.
Notre-Dame-de-Gravenchon, Seine-Maritime
Lors de travaux pour installer un pipeline, le conducteur d'un bulldozer fait une macabre découverte : sa pelle rencontre un corps humain. Au final, c'est pas moins de cinq cadavres qui vont être déterrés. Les corps, des adultes de sexe masculin, n'ont plus de mains, plus de dents et même leur crâne a été scié pour en extraire le cerveau. En l'absence de la moindre piste, la Crim' demande au profiler Franck Sharko de reprendre le service.
Mon avis
Dans Train d'enfer pour ange rouge, et surtout Deuils de miel (mon Thilliez préféré), j'avais beaucoup aimé le personnage de Sharko,
ce flic torturé, pour qui j'avais eu beaucoup d'empathie. N'ayant pas lu un Thilliez depuis L'anneau de Moebius, c'est donc avec un double intérêt que j'ai
ouvert ce Syndrome [E] : voir
l'évolution de l'auteur et retrouver Sharko.
Je suis Thilliez depuis ses débuts dans la collection Rail/Noir, alors qu'il était encore anonyme, lui qui, vous le savez peut-être, a pris une nouvelle dimension au niveau de la notoriété et des ventes ces dernières années, après l'adaptation ciné de La chambre des morts et son transfert du Passage au Fleuve Noir.
On retrouve ici ce qui a fait le succès de ses premiers romans.
Des intrigues solides et plutôt originales – le film qui rend aveugle ici, par exemple. Des intrigues, oui, car au départ il y en a bien deux, distinctes, bien qu'il ne faille pas être grand clerc pour deviner qu'elles vont être amenées à converger, tout comme Sharko et Hennebelle (qui avait elle aussi enquêté dans deux précédents romans : La chambre des morts et La mémoire fantôme).
Une capacité à apporter au lecteur des connaissances scientifiques sur des sujets divers (le cerveau, le cinéma d'antan...) tout en ayant l'air de ne pas y toucher.
Une maîtrise du niveau de suspense que d'aucuns peuvent lui envier. Franck Thilliez parvient à accrocher son lecteur dès le départ puis ne le lâche plus, sans pour autant en rajouter des caisses comme pourrait le faire l'auteur de thriller novice, prêt à en mettre plein la vue à son lecteur avec force cliffhangers plus ou moins réussis à l'appui.
Des personnages réalistes, tourmentés et travaillés en profondeur, auxquels il est plutôt aisé de s'identifier, bien loin des super-héros que l'on rencontre parfois dans le polar. Sharko a évolué depuis la dernière fois. Il n'est pas en grande forme (on le serait à moins) et a désormais quelques lubies qui rappelleraient presque Monk, autre enquêteur de fiction (il lui faut nécessairement une baignoire à l'hôtel par exemple).
Nonobstant ces qualités, je n'ai pas été totalement convaincu par Le syndrome [E]. Je pense que ma déception est en grande partie due à une composante du récit à laquelle l'auteur ne m'avait pas habitué jusqu'à présent : l'histoire d'amour. Je l'ai vue venir petit à petit, et j'ai eu le temps de me dire «non, il va quand même pas nous faire ça, on est pas dans un Harlequin là. » Et pourtant si... Peut-être que certains lecteurs (certaines lectrices ?) auront trouvé cet aspect réussi. Tant mieux. Pour ma part je ne l'ai même pas trouvé pertinent et je pense qu'on aurait très bien pu s'en passer.
Ma semi déception vient sans doute aussi du fait qu'on m'a beaucoup vanté ce roman, et en particulier son dénouement censé obliger le lecteur à se ruer sur la suite. J'ai trouvé qu'il était correct mais qu'il ne cassait pas pour autant trois pattes à un canard.
Au final, et bien que n'ai pas retrouvé le même plaisir de lecture que celui que j'avais éprouvé à lire Deuils de miel , j'ai passé un bon moment avec Le syndrome [E] et je lirai sans doute GATACA un jour ou l'autre, mais je n'ai nullement éprouvé le besoin de me ruer dessus.
Le syndrome [E], de Franck Thilliez, Fleuve Noir (2010), 430 pages.